Henri Barbé (né à Paris le 14 mars 1902, mort à Paris le 24 mai 1966), fils d’une couturière à domicile, est reconnu, le 11 juillet 1903, par le mariage de sa mère avec Henri Barbé, ouvrier mécanicien à Montluçon (Allier).

Membre du BP

Exclu en 1934

Il obtient son Certificat d’études primaires en 1913, et commence à travailler à l’âge de douze ans, comme employé chez Hotchkiss puis chez Berliet, à Lyon (Rhône), où ses parents ont déménagé.

En  1917, il revient à Saint-Denis où il travaille comme ouvrier. Il est régulièrement renvoyé pour sa participation à des grèves, entre 1917 et 1920.

En 1917, Barbé adhère au Parti socialiste et aux Jeunesses socialistes.

Il est régisseur du groupe théâtral local, et lors de la grève de mai 1918, il est l’organisateur des fêtes en faveur des grévistes et participe à ce titre aux réunions du comité de grève.

Partisan de l'adhésion à la IIIe Internationale, il suit la majorité lors de la scission du Congrès de Tours en décembre 1920 et devient membre du Parti communiste.

Incorporé en mai 1922 au 151e régiment d’infanterie en garnison à Thionville (Moselle), il se fait inscrire au peloton de formation des caporaux, conformément aux consignes du PCF. Il est nommé caporal en juillet. Au cours d’une permission, Jacques Doriot, secrétaire général des Jeunesses communistes, lui demande de faire partie des troupes d’occupation de la Rhénanie, en se faisant muter dans le service actif, pour organiser la fraternisation avec les travailleurs allemands. Ce qu’il fait.

Barbé revient du service militaire en octobre 1923, et la fin de la même année, il prend la tête des Jeunesses communistes de Saint Denis, en remplacement d’Henri Lozeray appelé par Doriot à la fonction de trésorier national des Jeunesses. Pour les élections législatives de mai 1924, Barbé aidé par quatre-vingts jeunes propagandistes mène une active campagne qui assure une nette victoire à Doriot.

À vingt-deux ans, Barbé est le véritable animateur de la section communiste de Saint-Denis. En juin 1924, il entre à la direction régionale parisienne des JC. Il assiste aux travaux du Ve congrès mondial, à Moscou, en août 1925, et fait partie des délégations reçues par Trotsky et Staline.

En 1926, Doriot lui demande de s’occuper de l’organisation régionale des Jeunesses communistes de Seine et Seine-et-Oise, comme permanent, rétribué 800 F par mois. Malgré l’opposition de son père, il accepte d’être un «révolutionnaire professionnel».

Barbé entre au Comité central des JC, en novembre 1924.

Le quatrième congrès communiste, réuni à Clichy du 17 au 23 janvier 1925, l’élit au Comité central (comme délégué de la JC) et à la commission syndicale.

Comme tous les responsables de la Jeunesse, Barbé accumule les inculpations pour «provocation de militaires à la désobéissance». L’ensemble des condamnations pour la période 1926-1929 représente dix-huit années de prison et 100 000 francs d’amendes. Seule une élection au Parlement peut lui éviter un nouveau séjour en prison. Candidat aux élections législatives d’avril 1928, dans la deuxième circonscription de Paris, il n’est pas élu.

Barbé sous la menace de treize ans de prison, accepte de partir à Moscou, comme délégué de l’Internationale communiste des Jeunes.

Après son échec électoral de 1928, Barbé entre à l’Exécutif de l’Internationale des Jeunesses communistes et est élu délégué du PCF auprès de l’Exécutif de l’IC, membre du Présidium et de son secrétariat, au congrès mondial de juillet-septembre 1928. Dimitri Manouilski, dirigeant de l’IC qui suit le PCF, le charge de renforcer l’application des directives de l’IC au sein du CC et du BP du PCF. Ainsi prend forme le groupe de la Jeunesse, composé de tous les membres de la direction de la Fédération des Jeunesses (François Billoux, Ambroise Croizat, André Ferrat, Raymond Guyot, Eugène Galopin) et des anciens JC (Barbé, Pierre Celor, Henri Lozeray). Lozeray et Celor assurent la direction du Groupe, en liaison constante avec Barbé qui suit les cours de l’École léniniste internationale de Moscou. Le noyau se fixe comme objectif, sous l’impulsion de l’IC, de placer rapidement les meilleurs militants jeunes aux postes de direction, à Paris comme en province.

Lors du VIe congrès de l'IC, en août 1928, le secrétaire général du PCF, Pierre Semard intervient en séance plénière pour demander que l'on n'assimile pas social-démocratie et fascisme, au nom de la tactique «classe contre classe». L'affaiblissement du rôle de Semard est alors concrétisé par la décision poussée par l’IC, de supprimer le poste de secrétaire général.

Le sixième Congrès du PCF en mars-avril 1929 (auquel Barbé ne participa pas car, illégal ; il est alors à Bruxelles au bureau clandestin du PC à l’étranger) approuve la tactique «classe contre classe» et, à la demande de Sémard, désigne un Secrétariat collectif composé de Barbé (liaison avec l’Internationale communiste), Thorez (responsable politique), Frachon (responsable syndical), Celor (lutte antimilitariste, anticolonialiste et liaison avec les JC).

Les responsables du Komintern s’inquiètent de la chute des effectifs du PCF. Dès février 1930, ils se demandent s’ils n’ont pas fait un faux pas en misant uniquement sur le groupe de la Jeunesse. Début mai, la délégation française est convoquée à Moscou pour entendre un rapport soulignant la baisse du nombre d’adhérents (55 000 en 1926, 39 000 au printemps 1930), la faiblesse de l’implantation dans la région parisienne et la perte de lecteurs de la presse communiste. Manouilski attribue ces défauts, non à la politique de l’Internationale qui est «juste», mais à «une application insuffisante de cette ligne» ; il critique les « jeunes cadres » qui « apprennent la politique sur le dos du Parti ». L’IC n’ayant pas d’équipe de relève donne mandat à la direction Barbé, Celor, Thorez de modifier radicalement la situation du PCF. Barbé, clandestin, ne pouvait pas reprendre les rênes de l’appareil (il est le secrétaire général potentiel pour l’IC), c’est à Maurice Thorez, sorti depuis peu de prison et présent à Moscou, que revient la tâche de tirer le bilan de la situation du Parti devant le Comité central des 17 et 18 juillet 1930. Thorez accède au secrétariat général tandis que le bureau politique passait de dix-sept à huit membres : Maurice Thorez, Henri Barbé, Marcel Cachin, Doriot, André Ferrat, Gaston Monmousseau, Pierre Semard, Henri Lozeray.

Thorez, secrétaire général, est cependant accompagné d’un «collège de direction» animé par le Tchèque Eugen Fried, envoyé permanent de l’IC qui assure de fait la tutelle du PCF.

En juillet 1931, Manouilski vient en personne à Paris demander l’élimination du groupe de la Jeunesse, accusé d’activités fractionnelles secrètes et de complot contre le Komintern.

L’«affaire Barbé – Celor » démarre donc en juillet 1931.

Manouilski, après avoir consulté Maurice Thorez et André Marty, obtient de Raymond Guyot qu’il fasse son autocritique en dénonçant devant le bureau politique l’existence d’un groupe occulte. Guyot accuse le groupe de préparer une espèce de rébellion contre la politique du Komintern et Thorez «s’efforce de faire du groupe le bouc émissaire de tout ce qui ne marche pas dans le parti et sa direction [...]. Il explique aux membres du BP éberlués que lui, Thorez, a appris l’existence du groupe grâce aux révélations de Raymond Guyot et de Manouilski ». Le Comité central des 26-28 août 1931 concentre les attaques contre Barbé et Celor (écartés du BP). Lozeray, Billoux, Claude Servet sont blâmés. Eugène Galopin et Louis Couteillhas échappent aux sanctions.

Barbé, encore confiant dans l’Internationale, accepte de faire son autocritique puis de se rendre à Moscou avec Celor, en octobre 1931, pour étudier les problèmes posés par l’existence d’un soi-disant « provocateur » dans le Groupe de la Jeunesse. Barbé perd ses responsabilités dans les instances dirigeantes de l’IC. Barbé reste plusieurs mois à Moscou, où sa compagne le rejoint en janvier 1932.

De retour d’URSS vers octobre 1932, Barbé légalise sa situation militaire en se présentant au bureau de recrutement le 4 novembre, l’autorité militaire le recherchant pour «insoumission» depuis son absence à une période de réserve le 7 août 1928. Arrêté le 18 novembre 1932 et écroué à la prison du Cherche-Midi, il est condamné le 13 janvier 1933, par le Tribunal militaire permanent de Paris à huit mois de prison et confirmé dans sa dégradation.

Barbé retrouve sa fonction de conseiller municipal de Saint Denis. Son autocritique et son action à Saint-Denis lui permettent de retrouver l’estime de la direction. Jacques Duclos écrit dans l’Humanité du 13 octobre 1932 : « Prenons, par exemple, le camarade Barbé, dirigeant du « groupe ». Il est clair que ce camarade, qui s’est particulièrement trompé, a su montrer depuis, par son travail et son attitude juste, en reconnaissant l’étendue de ses fautes et en commençant à les corriger, qu’il était un militant honnête et méritait la confiance du Parti. »

Après l’exclusion de Doriot le 27 juin 1934, Barbé prend la parole en sa faveur, le 5 juillet 1934, à Saint-Denis.

Suite à ce soutien, Barbé est exclu le 12 septembre 1934. Un rapport du comité central paru dans les Cahiers du Bolchevisme du 15 septembre 1935, le présente comme «l’ancien chef du groupe opportuniste sectaire Barbé-Celor, fondé par Doriot», puis l’accuse d’avoir précipité l’exclusion de Charles Auffray, maire de Clichy, des six conseillers municipaux de Paris (Jean Garchery, Louis Sellier, Louis Castellaz, Charles Joly, Camille Renault, Louis Gélis) et de Jules Lauze, maire de Viletaneuse, sans tenir compte des intérêts électoraux du Parti communiste.

Dans l’Humanité du 12 février 1980, Danielle Tartakowsky remet en cause l’exclusion de Barbé et Celor, et la notion même de « groupe » : « Pourquoi qualifier de groupe une direction mise en place quelques mois plus tôt par l’Internationale ? Pourquoi jeter l’opprobre (on parlera bientôt de « groupe policier ») sur ce qui ne fut au terme du compte qu’un effet limité, inhérent à un parti qu’aucune pratique unifiante n’était venue doter d’une véritable direction homogène ? ».

Premier adjoint de Saint-Denis à partir des élections municipales de mai 1935, Barbé est réélu à cette fonction en 1937, et devient le principal collaborateur de Doriot dont il approuve le ralliement au fascisme.

Le 28 juin 1936, le Parti populaire français (PPF) est créé à Saint-Denis. Barbé siége au bureau, comme secrétaire général, aux côtés des anciens communistes Marcel Marschall (trésorier), Paul Marion (propagande), Alexandre Abremski et Victor Arrighi. Il assure également la vice-présidence de l’Union populaire de la Jeunesse française.

Pendant trois ans, il est l’organisateur et l’un des responsables politiques du PPF. En octobre 1939, un brusque conflit, plus personnel que politique, l’oppose à Doriot. Avec quelques jeunes militants, il crée un comité de lutte anticommuniste puis fonde un Bureau d’études sociales. Désireux de s’engager dans la politique de collaboration sans renouer avec le PPF, Barbé entre au Rassemblement national populaire (RNP), fondé par Marcel Déat en février 1941, et fait partie de son secrétariat. Il devient secrétaire du Front révolutionnaire national lancé par le RNP. Il se réconcilie avec Doriot en octobre 1942, au moment où le PPF prend le pas sur le RNP. Il ne quitte pas pour autant son organisation. Il fonde en février 1943 un Front révolutionnaire national, pour réunir dans l’action les groupes fascistes. Le comité de direction comprend outre Barbé (secrétaire général) deux anciens du mouvement ouvrier : Francis Desphelippon et Marcel Capron. Le Front organisa quelques meetings avant de disparaître.

Malgré la rupture d’octobre 1939, il semble avoir conservé la confiance de Doriot qui envisage de lui confier le ministère du Ravitaillement (il hésite entre Barbé et François Chasseigne), dans son hypothétique gouvernement proposé aux Allemands, le 6 août 1944.

Barbé ne part pas en Allemagne avec les principaux partisans de la « collaboration totale ». Arrêté, il purge plusieurs années de prison. Il est libéré en 1949. Il reprend son action anticommuniste dans les revues Est-Ouest (animée par Boris Souvarine) et Itinéraires (revue catholique fondée par Jean Madiran, en 1956). Il écrit dans le Figaro des articles signés XXX.

Ayant trouvé la foi religieuse, il reçoit le baptême catholique en 1951 et se réconcilie avec Celor qui l’a précédé dans la conversion.

Henri Barbé meurt subitement le 24 mai 1966 à la clinique Saint-Michel à Paris. Ses obsèques religieuses ont lieu le 27 mai 1966 à Maisonnisses (Creuse).

Il épouse le 29 mai 1933, Georgette Giraud, sténo-dactylo, qui était la fille d’un conseiller municipal communiste d’Ivry-sur-Seine (Val-de-Marne) et membre elle-même du PC.

 

Sources

Henri Barbé – Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier - Jean Maitron, Claude Pennetier

Henri Barbé - Wikipédia

Responsabilités au PCF

Présidium et CE de l’IC : 1928 - 1931

Membre du Comité central, du Bureau Politique : 1925 – 1931

Mandats électifs

Conseiller municipal de Saint Denis : 1929 - 1940

Publications

Classe contre classe. La question française au IXe Exécutif et au VIe congrès de l’IC, Paris, Bureau d’éditions, 1929

Contribution à l’Histoire du Parti communiste français : « le groupe Barbé-Celor » (en collaboration avec Pierre Celor), Est-Ouest, 1957, n° 177