Charles-André Julien (né le 2 septembre 1891 à Caen (Calvados), mort le 19 juillet 1991 à Paris), fait ses études secondaires au lycée d'Oran (Algérie), où sa famille s’est installée, en 1906.
Professeur de fac, orientaliste Départ en 1926 |
Son père Étienne Julien, professeur agrégé, d'une famille protestante originaire de Castres est dreyfusard, ami d’enfance de Jaures.
Charles André Julien adhère à la SFIO (Section française de l'Internationale ouvrière) en 1909. Il est en relation avec Jaures, peu avant son assassinat en juillet 1914.
Après avoir obtenu son baccalauréat, Il travaille aux écritures comme auxiliaire au Trésor puis rédacteur à la Préfecture d’Oran. Dès son entrée dans le monde du travail, il se heurte aux grands propriétaires oranais, aux trafics coloniaux et à la dépossession des terres algériennes. Choqué par le traitement dont sont victimes les Algériens, il s'engage très tôt dans l'action politique. Il se range à gauche et fait la connaissance d'intellectuels et d'hommes politiques opposés au système colonial, parmi lesquels Félicien Challaye, André Gide. Il soutient la révolution bolchévique en Russie à partir de 1917.
En octobre 1919, il est candidat SFIO à la députation. Sans l’emporter, il décuple les voix socialistes. Il se représente pour les élections au Conseil général d’Oran. En doublant encore le nombre de voix, il est élu.
En 1920, il est reçu à l'agrégation d'histoire et géographie et est nommé professeur en Algérie.
Délégué au congrès de Tours en décembre 1920, il vote pour l'adhésion à la IIIe Internationale et devient l'un des dirigeants du Parti communiste (au départ appelé SFIC, Section française de l'Internationale communiste) pour l'Algérie.
En 1921, il fait partie de la délégation du PCF (avec Frossard, Souvarine, Vaillant-Couturier) pour le congrès de l'Internationale, en Russie ; il croise l'intelligentsia révolutionnaire : Lénine, Trotsky, Zinoviev, Gorki et Hô Chi Minh.
Julien quitte le Parti communiste en 1926.
Il est nommé professeur à Paris, successivement au lycée Janson-de-Sailly (1926-1932), au lycée Montaigne (1932-1941), et au lycée Condorcet (1941-1942).
En 1931, il écrit son premier livre, Histoire de l'Afrique du Nord. Dans cet ouvrage, il contredit les thèses de l’époque selon lesquelles l'histoire de l'Algérie commence en 1830.
Pour se constituer un réseau d'informateurs, il entre en contact avec les mouvements indépendantistes, notamment avec le groupe formé autour de Bourguiba, avec qui il se lie d'amitié.
En 1936, au moment du Front populaire, il redevient membre de la SFIO. Léon Blum, devenu chef du gouvernement en juin, le nomme secrétaire du Haut Comité méditerranéen et de l'Afrique du Nord (1936-1939), qui doit permettre au Front populaire de trouver des solutions aux problèmes liés à la présence française en Afrique du Nord.
Dans les années 1945-1947, les colonies sont secouées par des mouvements : en Algérie à Sétif (mai 1945), puis en Indochine et enfin, en 1947, à Madagascar. C'est après la révolte de Madagascar, durement écrasée, qu'il décide de s'engager dans la voie du journalisme. Il participe notamment à la création du journal Le Monde, ce qui lui permet de gagner l'amitié de son fondateur, Hubert Beuve-Mery.
Après l'établissement de la Quatrième République, il est élu membre du Conseil de l'Union française.
En 1947, il soutient sa thèse de doctorat : Les débuts de l'expansion et de la colonisation françaises (XVe-XVIe siècles.
Quoique professeur d'université, membre de la SFIO et conseiller de l'Union française, il est surveillé par les autorités en raison de son anticolonialisme.
Julien mène une contre-enquête après la mort du syndicaliste tunisien Farhat Hached et accuse l'organisation de la Main rouge et la Résidence d'être à l'origine de sa mort.
Le 19 avril 1950, dans un article du Monde, il demande à la France de réviser sa politique de protectorat en Tunisie qui est pour lui, politiquement dépassés.
Lors de la crise marocaine (1953), il est le conseiller du sultan Mohammed V.
Après l'indépendance du Maroc, il est invité par le roi Mohammed V à fonder l'université de Rabat et est nommé doyen de la faculté des lettres. Il assume en même temps sa charge de professeur à la faculté des lettres de Paris.
En 1958, avec les minoritaires de la SFIO (Andrée Viénot, E. Depreux, R. Verdier, A. Savary...), Julien sort de la SFIO pour fonder le PSA qui deviendra plus tard le PSU.
En 1961, année de la mort de Mohammed V, il démissionne de ses fonctions à l'université de Rabat, ne voulant pas cautionner l'évolution du régime.
Il préside, dès la disparition à la fin de 1965, le Comité pour la vérité dans l’Affaire Ben Barka.
Julien devient professeur émérite de l'université de Paris en 1971, mais continue à travailler sur l'Afrique du Nord en dirigeant deux collections : « Pays d'Outre-Mer » aux Presses universitaires de France, qu'il dirige depuis 1947 ; « Les Africains » chez L'Harmattan, à partir de 1977.
En 1986, il fait don de sa bibliothèque (« Fonds Charles-André Julien ») au Centre des hautes études sur l'Afrique et l'Asie.
Sources
Charles André Julien – Wikipédia
Charles-André Julien – Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier - René Gallissot
Publications
Histoire de l'Afrique du Nord : Des origines à 1830, Paris, Payot & Rivages,
Livre I : Des origines à la conquête arabe, en collaboration avec Roger Le Tourneau,
Livre II : De la conquête arabe à 1830, 1951,
L'Afrique du Nord en marche, Paris, Omnibus, 1982,
Les Voyages de découverte et les Premiers Établissements (XVe-XVIe siècles), Paris, PUF, 1948.
Et la Tunisie devint indépendante, 1951-1957, Éditions du Jaguar,
Histoire de l’Afrique blanche, Paris, PUF, 1966
Techniciens de la colonisation, Pays d'Outre-Mer,
Histoire de l'Algérie contemporaine 1. La conquête et les débuts de la colonisation 1827-1871, Paris, PUF, 1964
Histoire de l'Afrique blanche : des origines à 1945, PUF, 1976
Le Maroc face aux impérialismes : 1415-1956, Éditions du Jaguar, 2011.